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2 février 2012 4 02 /02 /février /2012 11:16

 « J’ahborre vos tyrans, vos cruautés me font horreur. »
Olympe de Gouges aux Noirs révoltés de 1792 (1)

 

 

Certains pensent en marchant, ou en écrivant, moi comme un des personnages d’Alphonse Daudet, je pense en parlant. En conséquence mes interventions en réunion ne sont pas là pour convaincre mais pour informer et réfléchir à haute voix. Aussi je reviens sur la philosophie d’Olympe de Gouges qui ne concerne pas qu’Olympe.
Elle dénonce les cruautés des colons dsè 1783 (elle sera victime d'ignomines de leur part) puis quand les Noirs se révoltent elle dénonce les cruautés des Noirs. Certains pour montrer son rôle précurseur vont surtout braquer le projecteur sur sa dénonciation de la situation faite aux Noirs. D’autres vont ensuite dire qu’elle renvoie dos à dos les deux cruautés. Dans les deux cas, c’est une Olympe tronquée qui est présentée. Pour donner sa position, faute d’un autre mot j’ai écrit qu’elle était « centriste » mais le centriste renvoie dos à dos l’exploiteur et l’exploité. Olympe a toujours été du côté du faible, mais sans pour autant justifier tous les actes du faible !

Quand je titre, la philosophie d’Olympe, je ne parle pas de son discours philosophique mais bien de sa philosophie de vie qui la conduit à être en conformité avec ses propres œuvres philosophiques. C’est là une autre caractéristique du personnage qui ne la concerne pas qu’elle. Elle a écrit le Bonheur primitif de l’homme dont elle dit en 1792 que c’est bien sûr une chimère comme le Contrat social et d’autres œuvres, ce qui lui permet d’ajouter :
« Les imitations de Jean-Jacques sont défigurées dans ce nouveau régime, que seraient donc celles de Mme de Gouges et celles de Brissot ? Il est aisé, même au plus ignorant, de faire des révolutions sur quelques cahiers de papier ; mais hélas ! l’expérience de tous les peuples, et celle que font les Français, m’apprennent que les plus savants et les plus sages n’établissent pas leurs doctrines sans produire des maux de toutes espèces. Voilà ce que nous offre l’histoire de tous les pays. » (2)

Sa philosophie, plutôt que centriste, pourrait-elle être désignée comme réaliste ? Un réalisme qui la conduit à s’auto dénigrer : elle affirme sans cesse qu’elle est sans talent mais qu’elle a des causes à défendre. Ce terme de réaliste ne suffit pas puisqu’elle est d’abord une activiste. Sa philosophie de l’action est enfermée dans le carcan du rousseauisme (la théorie du bon sauvage) dont lucidement elle constate que les événements le « trahisse ». On repense à Marx et à ce que des marxistes ont fait subir à son œuvre en prétendant la mettre en pratique.

Les intellectuels écrivent des chimères (et elle avec) et ils doivent savoir qu’à combattre des maux, ils produisent des maux. Olympe est donc tout simplement une idéaliste qui n’a pas compris qu’on ne fait pas une révolution sans casser des œufs ? Mais pourquoi, à s’opposer au fatalisme du système dominant faudrait-il tomber dans cet autre fatalisme faisant de la révolution un excès de massacres ?
J’entends des voix me disant tout simplement que la femme Olympe est « naturellement » une sentimentale or le combat social n’est pas affaire de sentiments. La théorie de la Nature où tout est beau et bien, une Nature malheureusement pervertie par l’homme et son avidité d’or, n’est pas le produit d’un sentimentalisme féminin !
Ni centriste, ni réaliste, ni sentimentaliste, Olympe appartient-elle à ce courant historique désigné sous le nom de social-démocratie qui voudrait seulement adoucir les tares de systèmes si puissants que leur renversement déclenche des tempêtes ?

Dans le camp des dominants, les « durs » disent : « Surtout n’adoucissons pas le système sinon l’adversaire va en profiter pour nous éliminer ! ». Et dans le camp adverse des « durs » disent : « Pinochet a pris le pouvoir au Chili et c’est très bien car l’adversaire montre ainsi son vrai visage et la révolution va pouvoir aller à l’essentiel. » Bien sûr Olympe est contre les deux extrêmes mais surtout contre le mécanisme qu’ils enclenchent car l’un appelle l’autre. Quand la France conduit une guerre sans nom en Algérie, elle se fabrique des adversaires qui sont obligés d’être très sévères dans leurs rangs, et au jour de la victoire, les forces modérées sont éliminées.

Olympe est une modérée, ça c’est sûr, mais pas une modérée pour le bonheur de la modération en soi, mais parce qu’elle sait qui paie la note à l’arrivée, à savoir le Peuple qu’elle défend. Il ne s’agit pas d’une modération qui appelle à la conciliation mais d’une modération qui met au sommet de la hiérarchie des valeurs, le respect de la vie. Position philosophique qui la conduira sur l’échafaud…

Quand Olympe considère que ce n’est pas en guillotinant le roi qu’on guillotine la royauté, l’histoire lui a donné raison. Raoul-Marc Jennar est Belge et il a été étonné en arrivant en France d’y découvrir une noblesse plus présente dans la gestion des affaires du pays, que dans son royaume de Belgique !

Olympe a tenté d’inaugurer une conception pratique de la révolution où l’analyse de la réalité concrète l’emporterait sur l’hypocrite invocation de modèles. Elle abhorre les Tyrans qui exploitent les Noirs, et la cruauté des Noirs révoltés qui tuent des propriétaires sans jugement lui fait horreur mais elle veut une révolution car elle sait que tous sont responsables mais qu’il y a des coupables, les tenants du système. Elle est finalement inclassable et c’est peut-être ça être révolutionnaire ?

Félix Castan a défendu Olympe de Gouges. Félix Castan était à la fois communiste et occitaniste. Les occitanistes le considéraient comme un faux occitaniste car communiste, et inversement les communistes se disaient, « mais comment peut-il être occitaniste ? » (depuis il y a eu des évolutions). Or chez lui, défendre Olympe, la culture occitane et l’engament communiste était une seule et même chose. Braquer le projecteur sur une dimension, c’est tronquer le personnage. Pour Olympe comme pour lui, la première démarche était celle « de l’analyse concrète de la situation concrète ». Il ne s’inventait pas une France mythique ou un Peuple mythique mais partait d’une France réelle, plurielle et à partir de ce constat on pouvait articuler une conception de la révolution. Ma différence avec Félix Castan, c’est que je ne fais pas d’Olympe une grande écrivaine, et je n’arrête pas l’analyse de la situation à un moment donné, celui de ma jeunesse par exemple. La langue occitane aujourd’hui est dans une situation radicalement différente de celle de 1950 et en tenir compte ne signifie ni baisser les bras, ni se crisper sur le passé mais agir en conséquence, ce qui supposerait une autre article.

Pour répondre à la question de départ je conclus par ces mots : « En tant qu’inclassable, Olympe est une révolutionnaire. »
02-02-2012 Jean-Paul Damaggio
1 ) dans la même préface à l’Esclavage des Noirs, de 1792
2) dans la même préface. (voir le livre Olympe de Gouges aux enfers, Ecrits sur le théâtre).

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