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15 janvier 2012 7 15 /01 /janvier /2012 11:29

Un très bel article de Maurice Lemoine dans le Monde diplomatique de janvier 2012  nous incite à proposer un bilan sur la situation dans le sous-continent. Maurice Lemoine s’est plongé sur l’histoire des rapports entre Internationale socialiste et Amérique latine, un sujet en effet très riche, qui, en retour, permet de comprendre le fonctionnement du PS en France. Je partage l’ensemble de l’argumentation de Maurice Lemoine mais je suis resté sur ma fin quant à l’analyse de la situation actuelle. Après l’étape dictature, que l’Internationale a dénoncée, l’Amérique latine a connu l’étape néolibérale que la même Internationale a accompagnée en prétendant en amoindrir les effets. A présent, il y aurait une phase dépassant les positions de l’Internationale, celle des pays qui en matière sociale ont eu « des notables avancées ». On pense tout de suite au Venezuela, à la Bolivie, à l’Equateur et peut-être au Brésil et à l’Argentine.
Je dis peut-être car en fait, le cas du Brésil, mériterait une étude à lui tout seul. Le Parti des Travailleurs a depuis longtemps un poste d’observateur à l’Internationale socialiste ce qui fait qu’il a un pied dedans et un pied dehors. Pour être plus à gauche que l’Internationale socialiste ? Qui se souvient de l’article commun signé Lula-Sarkozy ? Si le Parti des Travailleurs a pu s’implanter solidement au Brésil, il le doit à un tour de force de Lula : promouvoir les intérêts de la bourgeoisie brésilienne dans le monde, et satisfaire quelques demandes sociales des habitants du pays. Quand j’entends que le Brésil est un pays émergent ça signifie qu’il s’émancipe des USA mais pour jouer un rôle équivalent, au bénéfice de sa bourgeoisie nationale. Le Brésil veut en Amérique latine jouer le rôle dévolu autrefois aux USA, non sous la forme des dictatures imposées, mais sous la forme de relations économiques inégalitaires. En conséquence, avec certaines personnes je me réjouis de cette déstabilisation de la puissance nord-américaine, mais en même temps s’agit-il d’une sortie réelle du néolibéralisme ? Nous sommes très loin des objectifs de « Porto Alegre ».

Oui, l’Amérique latine est un champ d’expériences intéressantes comme ce fut le cas avec la théologie de la libération, les guérillas, Cuba ou le sandinisme. Mais après plus de dix ans de révolution bolivarienne où en est-on ? Humala vient d’être élu au Pérou avec l’appui de la gauche qui déjà se mord les doigts de l’avoir soutenu, puisque en cent jours, il est passé au centre droit. Pourquoi et comment ? Avant son élection il y avait un sujet chaud, le développement de mines à Cajamarca. Il avait promis qu’avant toute décision la population serait consultée. Le hasard a fait que je connais un peu cette région pauvre où les dieux des multinationales veulent apporter le bonheur en bonne et due forme. Or les habitants refusent un « développement » dont les Péruviens pauvres connaissent parfaitement les conséquences car il y a eu de grandes villes minières comme Puno, La Oroya ou surtout Cerro de Pasco. Après l’exploitation honteuse des populations ces villes sont devenues des vides géants. Le deuxième gouvernement d’Humala, sous la direction des militaires, a donc décidé d’abandonner toute concertation, et toute parole donnée au peuple qui pourtant ne s’oppose pas à l’idée d’immenses mines, mais souhaite pouvoir contrôler leur forme afin de ne pas léser les droits des habitants. Même scénario de l’autre côté de la frontière, en Equateur. Correa a décidé de jouer aussi la carte des grands investissements avec l’International Minerals Corporation et autres multinationales canadiennes. C’est sûr, le capitalisme yankee est envoyé dans les roses, mais celui du Canada est-il meilleur ? Les Indigènes sont sidérés : la Constitution de l’Equateur impose une consultation des habitants avant un tel investissement de 3000 millions de dollars (« la seconde mine de cuivre la plus grande du monde » dit le président) et le pouvoir répond qu’information vaut consultation alors que, même l’information reste minime. La CONAIE, organisation emblématique des Indigènes, a promis des soulèvements mais le peut-elle encore ? Nous sommes dans le même cas de figure que la fameuse route bolivienne refusée par les Indigènes dont certains ont montré qu’ils étaient instrumentalisés par les ONG, ce qui est de l’ordre du possible sans rien changer sur le fond : ces pays sont face à des choix, le développement économique classique pour « le bien des peuples » ou l’invention d’un autre type de développement ?
Mais revenons sur « les avancées notables » dans les pays les plus à gauche en Amérique latine. Si on regarde l’espérance de vie, la démonstration est claire et nette, Cuba fait mieux que tout le monde et mieux que les USA. Le modèle tant dénigré pour sa dimension autoritaire, est totalement oublié quant à sa dimension sociale. Les difficultés économiques y sont grandes mais les politiques de santé protègent les populations. Les avancées notables sont dans cette direction mais pour les juger j’aime toujours me référer à l’avancée des droits des femmes car là où ils avancent on est sûr qu’ils avancent pour tous.

Or toutes les études montrent que si les femmes accèdent un peu plus au travail, un peu plus à la dignité, dans l’ensemble elles restent les victimes sociales les plus malmenées.
Un exemple mériterait une étude minutieuse, le droit à la retraite.
La vague néolibérale a produit des lois sur les retraites avant celles d’Europe. Le Chili a montré la voie en 1981, puis l’Uruguay en 1996, la Bolivie et le Mexique en 1997, le Nicaragua et l’Equateur en 2004, pour donner quelques exemples. Toutes ces lois ont un point commun : reculer l’âge de la retraite à 60 ou 65 ans… à égalité pour les hommes et les femmes. Les précédentes lois faisaient une distinction en permettant aux femmes de partir avant, mais sous prétexte que là-bas aussi l’espérance de vie est plus importante pour les femmes, les femmes ont payé fort les lois en question. Ces lois ont-elles été modifiées depuis ? Je n’en ai pas connaissance mais La Pensée  qui vient de publier un article sur le sujet n’y fait pas référence.
Le thème que j’étudie depuis longtemps est celui du droit à l’IVG et là, je peux assurer que non seulement il n’y a pas eu « d’avancées notables » mais des reculs certains. Le cas le plus exemplaire est celui du Nicaragua d’Ortega qui, tout en étant l’ami de Chavez pour avoir du pétrole à bas prix, reste un membre de l’Internationale socialiste. Mais nous pourrions parler de la nouvelle présidente du Brésil qui, en tant que femme, a tenu à rappeler qu’elle n’était pas pour une avancée des droits à l’IVG alors qu’une évolution dans la population est notable depuis les accouchements forcés de gamines. La situation sanitaire est dans ce pays dramatique.
Quand Maurice Lemoine indique que l’information en France sur l’Amérique latine de la part de quotidiens comme Libération et Le Monde est une catastrophe (c’est valable sur bien d’autres sujets) j’applaudis des deux mains mais croire, comme le fait Paul Ariès , que l’Amérique latine est un lieu qui redonne de l’optimisme à nos luttes c’est forcer le trait dans le sens contraire. El Pais du 13 janvier vient de publier un article à partir des propos de José Mariano Beltrame, le secrétaire à la sécurité de Rio pour confirmer que les narcos ont perdu la ville, mais suivant la formule connue chez les narcos : une ville de perdue, dix de retrouvées (je crois savoir que Rio attend un événement international ?). La violence est une avancée notable dans tout le sous-continent et qui sont les premières victimes : les femmes.
14-01-2012 Jean-Paul Damaggio

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