Dans le film de Luc Joulé et Sébastien Jousse produit par le Comité d’établissement de la SNCF de PACA nous croisons les cheminots en direct d’où le titre simple : Cheminots.
Le film, projeté en avant-première au Festival d’Uzeste, donne de belle manière la parole à divers cheminots qui s’expriment sur l’évolution de leur travail. A un moment, un ancien évoque le corporatisme de la profession, et un ami répond aussitôt : « il est moins fort qu’à l’EDF ». En fait, le film tourne autour de cette question globale qui, sans idéaliser le passé, permettait de maintenir le sens du « bel ouvrage ». Dans certains cas, on est cheminot de père en fils depuis des générations, et cheminot c’est un statut qui, faut-il le préciser, date de 1920, soit bien avant la nationalisation qui fut tardive en France, par rapport aux autres pays européens.
Au guichet, sur les voies, aux contrôles nous visitons une entreprise aux divers métiers. Tous les travailleurs font le même constat : les nouveaux critères économiques produisent deux effets, la pression sur les travailleurs, la perte de qualité et de sécurité pour les voyageurs.
A suivre le voyage des réalisateurs, on mesure la complexité d’un tel moyen de transport, complexité qui suppose un travail collectif permanent, et une organisation énorme. Or parmi les nouveaux critères économiques, on assiste à un fractionnement de l’entreprise qui suscite bien des soucis (le mot est faible) : quand il manque une locomotive dans un secteur, un autre secteur hésite, avant de proposer la sienne, car apparaît un conflit entre l’intérêt de la fraction, et l’intérêt global.
Reportage aussi du côté du fret : des trains Véolia commencent à circuler, mais ils sont souvent des trains fantômes pour les employés de la SNCF, qui pourtant ont en charge la sécurité du réseau. Les mécaniciens de ces trains privés connaissent mal les consignes, et la communication qui doit être rapide passe difficilement.
Et le TGV direz-vous ?
Dans le film c’est un épiphénomène. Nous découvrons seulement deux remarques : un cheminot qui indique que le TGV est nettement mieux traité que les TER, et un autre qui répond au téléphone et qui a au bout du fil une personne dotée d’un titre de transport iTGV. Le cheminot répond que pour la SNCF cette personne n’existe pas, que le billet iTGV n’est ni échangeable ni remboursable, que pour l’obtenir il faut cocher la case sur ce sujet…
Or comme l’indique la photo qui accompagne cet article, le camion du C.E. Cheminot d’Aquitaine porte le logo doté d’un beau TGV !
Le TGV est un épiphénomène alors qu’on aurait pu s’attendre à une glorification de cette merveille technique. Un peu comme si le sujet était embarrassant et donc à éviter aux yeux du producteur du film !
Pourtant le film commence par des discussions au guichet sur les difficultés pour comprendre la tarification… une tarification qui pour une bonne part est l’enfant du TGV.
22-08-2010 Jean-Paul Damaggio
PS : La projection a donné lieu à un débat le lendemain auquel je n'ai pu participer. Ajoutons qu'Uzeste est très proche d'une double LGV : Toulouse Bordeaux et Bordeaux-Hendaye