Overblog Tous les blogs Top blogs Littérature, BD & Poésie
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
MENU

Rendre compte de livres publiés et de commentaires à propos de ces livres

Publicité

Les persistants découvreurs des Amériques

Je ne sais ce qu’il en est en Italie ou en Allemagne mais en France la fabrique, à gauche, de «Régis Debray» se renouvelle à chaque période. Faute de réussir chez nous une révolution, les Amériques restent l’Eldorado de compensation au prix de l’oubli et d’une torsion grave de la réalité. Je ne sais où était Jean-Luc Mélenchon du temps du castrisme, du sandinisme ou même du temps où le PT brésilien avait fait de Porto Alegre la vitrine de la démocratie participative. Sans vouloir le froisser, entre la social-démocratie d’Allende et celle de Lula j’ai peur que l’écart soit immense, Lula qui en sont temps signa sur Libération une tribune commune… avec Sarkozy !
Le tournant du 11 septembre 1973
Dès l’élection d’Allende, Nixon en personne organisa son assassinat (je renvoie aux documents devenus publics de la CIA). Le même homme tendit les bras à la Chine communiste trop heureuse de se distinguer de l’URSS et de ses voisins vietnamiens. Nixon préparait déjà les suites de la défaite vietnamienne pour en faire une révolution du système impérialiste ! Le 11 septembre 1973 l’ambassade de Chine à Santiago resta « neutre » si bien que le succès économique de la Chine d’aujourd’hui est aussi un enfant de l’assassinat de l’expérience chilienne, dans le cadre d’une nouvelle division internationale du travail.
Les hasards de la vie ont fait que j’ai débarqué pour deux ans aux USA juste après la chute de Nixon à cause du Watergate qui démontra que les médias n’étaient plus le quatrième pouvoir mais bien le premier. Nixon tombait sous l’effet de sa propre stratégie ! En effet les USA de l’époque avaient déjà compris, dans la foulée d’IBM, que le contrôle du futur ne tiendrait pas entre les mains du capitalisme industriel (celui de General Motors) mais entre les seigneurs de la communication, grâce à une révolution informationnelle sans précédent. Aux Chinois les "basses" tâches matérielles et aux USA l’autre matière, la matière grise, celle du VIRTUEL., un virtuel qui, peut-être de manière imprévue, redonnait aux banques le pouvoir sur les industriels!
Oui l’Amérique latine est un champ d’expérience des USA qui peut tant et tant nous apprendre mais à condition d’éviter le piège des amazones, des vallées du paradis, de l’Atlantide et j’en passe…
La misère recule ?
Mais oui camarades, la misère recule au Venezuela, au Brésil, et alors ? Si je peux me réjouir que la spirale néolibérale faisant de l’enrichissement des uns (la minorité) l’appauvrissement des autres (la grande majorité) soit stoppée, je suis cependant obligée de vérifier par quoi elle est remplacée. La particularité de l’Amérique latine c’est qu’elle est le lieu au monde où les inégalités sont les plus immenses dans des proportions énormes. Un économiste me donnera peut-être les chiffres que je n’ai pas sous la main. J’ai touché du doigt le phénomène quand après quatre jours dans la Quito populaire, le Guide du Routard m’envoya dans un autre quartier pour y utiliser la carte bancaire. C’était la nuit et le jour ! C’était un peu comme si à Paris on avait construit le quartier de La Défense alors que nous aurions encore le XX ème arrondissement comme il était en 1950. Dernièrement, au guichet de l’embarquement pour le Chili, l’employé découvrant que nous allions à Santiago nous invita alors à aller à Las Condes, Providencia, pour y découvrir le Santiago moderne dont il est fier. A Valparaiso vous pouvez sur le marché croiser un paysan avec un âne qui tire la remorque de ses récoltes, à côté des instruments les plus modernes de communication. Si Cuba tient la distance c’est uniquement parce que cet écart de revenus n’y existe pas et que dans ces conditions la misère est plutôt une pauvreté et les quelques dignités qui vont avec.
Les conséquences des énormes inégalités
Quand des miséreux sortent la tête de l’eau et qu’ils voient à côté les gratte-ciels infinies alors ils sont parfois mûrs pour un autre avenir, ils se sentent assez forts, surtout s’ils sont jeunes, pour rejoindre les sangsues qui pullulent à très grande vitesse. Des sangsues qui pourtant se font la guerre mais l’épidémie est plus forte que les effets collatéraux ! Des parasites qui donnent la main sans gêne à nos parasites fiscaux que le vocabulaire de la classe dominante appelle « paradis fiscaux ». La nouveauté venue des Amériques actuelles, c’est le crime organisé qui bénéficie de la « sortie » du néolibéralisme.
En effet, dans la nouvelle division internationale du travail si les USA ne sont plus les méchants exploiteurs, les Bourgeoisies nationales appuyées parfois sur l’inévitable Chine se lancent dans l’exploitation de nouvelles sources de matière première. Mais dans des écosystèmes fragiles ça soulève des révoltes aussi bien en Bolivie qu’au Chili. Je connais un peu le cas de Cajamarca au Pérou où le pouvoir d’Humala, élu par la gauche, a tiré sur la foule des manifestants refusant une nouvelle mine. Le problème crucial dans toutes ces zones, c’est le pouvoir sur l’eau. Les industriels en font une consommation qui fait peur, à juste titre, aux populations. Quant au sympathique Correa qui lui, est resté fidèle à la gauche, il a mis en place une Constitution qu’il refuse d’appliquer quand il faut demander à des populations autochtones ce qu’elles pensent d’un mégaprojet sous contrôle équatorien-chinois. Il peut dénoncer les USA et garder comme monnaie nationale… le dollar !
D’anecdotiques présidents de la république
Face au crime organisé tous les présidents sont démunis, tous tentent des politiques sans résultats, tous en sont réduits à des promesses sans lendemain. Il n’y a plus de gauche ou de droite, il y a le besoin d’une reconstruction des Etats. Tous les présidents savent qu’autour d’eux règnent les corrupteurs (même à Cuba il a fallu être sans pitié) et le capitalisme dans tout ça ? L’inconvénient des parasites c’est qu’ils détournent à leurs profits une part de la richesse produite mais voilà qu’ils la réinjectent dans le système bancaire et y compris dans des politiques sociales substitutives des défaillances de l’Etat !
Oui, le néo-libéralisme cher à Reagan n’est plus qu’un mauvais souvenir mais pour y mettre quoi à la place ? L’homme le plus riche du monde est périodiquement un Mexicain roi de la communication car d’un côté il y a les nouveaux seigneurs qui après IBM on grandit chez Microsoft, Appel, Facebook, Google et autres, et qui regardent avec amusement la guerre autour des productions industrielles en quête permanente de paradis d’exploitation. Même Nike qu’on pourrait croire producteur industriel n’est en fait qu’un titre virtuel !
Au début des années 80 Paul Boccara attira l’attention des dirigeants du PCF sur la mutation en cours qui faisait passer le capitalisme de la révolution scientifique et technique à la révolution informationnelle et à ma grande surprise les dirigeants politiques qui connaissaient pourtant son immense compétence lui expliquèrent que l’informatique n’était qu’une variante de la révolution scientifique et technique. Aujourd’hui c’est en regardant le ciel qu’on comprend mieux la naissance de la terre. C’est aussi en regardant le ciel des satellites qu’on comprend mieux qu’en tapant Google sur mon ordinateur je conforte le capitalisme nord-américain dans ses succès. Comme j’ai avec moi des restes de marxisme je me dis que la production matérielle finira par prendre sa revanche sur les industries de la communication, que les tuyaux se révolteront contre le message mais faut-il encore appeler de ses vœux cette révolution !
Salvador Allende a failli troubler cette histoire. Voyant qu’il était au cœur de la lutte finale, il pensa se sauver en nommant comme ministre de la défense un certain Pinochet, donnant enfin à ses adversaires le chef qui leur manquait ! Dans un coup d’Etat, le plus dur c’est de trouver le chef, en conséquence, le nouveau système n’a plus à se chercher des chefs, il roule dans la clandestinité qui avait auparavant été si souvent révolutionnaire. Hillary Clinton l’a dit : les révolutionnaires d’aujourd’hui ce sont les armées du crime organisée, alors pensez, avec ça on va aller vers le socialisme… de je ne sais plus quel siècle.
Jean-Paul Damaggio

Publicité
Retour à l'accueil
Partager cet article
Repost0
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article