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20 février 2009 5 20 /02 /février /2009 11:08

Prix Goya RossignolArticle Le Tarn Libre 9-02-2009

Claude Rossignol retrace les souvenirs du Prix Goya

Créateur du Prix des lycéens, il raconte quinze années de bonheur

 

BON DE COMMANDE Editions La Brochure

 

Les « anciens » de la Borde Basse se souviennent de lui comme «le prof qui a inventé « le Prix Goya ». Claude Rossignol a enseigné les Lettres au lycée pendant 32 ans, il est aujourd'hui retraité. Originaire de Limoux, il a fait ses études à Toulouse et a passé son Capes en 1968. Il a fait son service militaire en coopération en Colombie,pendant 2 ans en tant que professeur de langue française. Cette expérience enrichissante lui a ouvert des objectifs pédagogiques nouveaux, basés sur la compréhension des élèves et la capacité à se mettre à leur niveau. Claude Rossignol a mis la confiance au cœur de sa pédagogie pour donner aux élèves l’envie et le goût d'apprendre, de lire et de « faire » des choses. Le Prix Goya résulte tout naturellement de cette conception de l’enseignement quelques année plus tard.

De retour en France en 1970, il est nommé au collège et lycée Jean Jaurès à Castres jusqu'a l’ouverture de la Borde Basse en 1973. Claude enseignait sans projet particulier, pourtant, lassé d'entendre les aigreurs de ses collègues concernant les élèves peu motivés (Socrate s’en plaignait aussi, dit-il) sans avoir de solution, il demeurait attentif. Jusqu’à cet article dans Le Monde sur le Prix littéraire premier roman de Chambéry. Très pragmatique, Claude lance l’idée dans l’une de ses classes en 1990. Les élèves sont unanimes et s’emparent aussitôt du projet avec un enthousiasme qui ne les lâchera pas pendant 17 ans. Le Prix Goya était né ! Claude s’entoure de la libraire Nicole Legrand (Graffiti), de Jeanne Cabrol (documentaliste au Lycée), et de toute une équipe de collègues solidaires. Ouvert à tous les élèves du lycée, l’objectif du Prix Goya est d’exprimer des sentiments à la lecture d’un roman. Débats et votes plébiscitent un auteur parmi d’autres invités à venir rencontrer les lycéens lors d’une cérémonie organisée au théâtre municipal. Certains auteurs étaient célèbres (Nadine Trintignant) d’autres le sont devenus (Marc Lévy). Le Prix Goya est devenu au fil des années la réussite que l’on connaît, une formidable aventure humaine et pédagogique qui a donné naissance au concours de nouvelles en 95 et au Prix Goya découverte pour le primaire en 96. Claude rassemble les souvenirs, témoignages et photos dans son ouvrage « Longue vie… au Prix Goya » (Ed. La Brochure) prix qui ne lui a survécu que 2 ans.

Chantal Lubienicki

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13 février 2009 5 13 /02 /février /2009 14:31

couvertugroussetUn communard honoré à Grisolles (82)

 

Paschal Grousset est le fils d’un principal de collègue né à Grisolles en 1816 et lui-même naît à Corte en Corse (1844). Le père, fils de Jean Grousset né à Finhan en 1790, revient dans son département en 1855 où il sera principal du collège de Montauban jusqu’en 1867. Il aura l’occasion d’y voir travailler son fils qui partira pour le Lycée Charlemagne en 1861.

Premier coup de génie de cet homme qui délaissa une carrière de médecin pour celle de journaliste ( à La Marseillaise où travailla aussi Léon Cladel) : il publie en 1869 Les origines d’une dynastie, le coup d’Etat de brumaire an VIII. Ce livre lui vaut l’inimitié du camp Bonaparte si bien que Pierre Bonaparte (cousin de Napoléon III) qu’il a provoqué en duel assassine Victor Noir, un de ses témoins. Il sera condamné à six mois de prison. Elu en mars au Conseil de la Commune il en devient le délégué aux affaires extérieures, responsabilité qui lui vaudra la déportation en Nouvelle Calédonie avec Louise Michel. En 1874, il réussit à s’évader avec Rochefort et se réfugie à Londres. De retour en France en 1880 il devient un député socialiste indépendant en 1893, 1898, 1902, 1906. Il sera

Homme politique, sa carrière littéraire est phénoménale, aux côtés de Jules Verne (pour la science-fiction) ou en solo (avec une grande série sur la vie au collège à travers le monde). Il utilisera pour cela des pseudonymes : Léopold Virey, Tiburce Moray, André Laurie, Philippe Daryl. Il meurt à Saint-Mandé en 1909.

C’est le 10, 11 et 12 avril que Grisolles honorera la mémoire de ce personnage trop oublié par un colloque et des projections de film. Il est lié à André Hinard lui aussi de Grisolles, dont il est le cousin.

 

En 1897 Félix Fénéon enquête pour la Revue Blanche sur la Commune de Paris et pour cela interroge d'anciens communards. Paschal Grousset, fut l'un d'eux.

 

M. Paschal GROUSSET membre de la Commune

délégué aux Relations extérieures pendant la Commune, aujourd'hui député :


Ce n'est pas seulement un chapitre de l'histoire de ma vie que vous me demandez, c'est tout un volume. Le volume est écrit, mais ne paraîtra qu'après ma mort. Laissons-le dormir. En peu de mots, voici mon sentiment sur le 18 mars.

Il est à peine besoin d'affirmer que deux millions d'hommes ne s'insurgent pas sans motif, - ne se battent pas pendant neuf semaines et ne laissent pas trente-cinq mille cadavres sur le pavé sans avoir de bonnes raisons.

Chez beaucoup, ces raisons étaient faites des longues souffrances qui sont la vie des sept huitième d'une nation prétendue civilisée. Chez d'autres, elles naissaient surtout des colères obsidionales, du grand effort stérilisé par l'impéritie officielle, des hontes de la capitulation et aussi de l'entente facilitée par le groupement des forces civiques. Chez tous l'idée dominante, l'idée maîtresse était la nécessité primordiale de défendre la République, directement attaquée par une Assemblée cléricale et royaliste.

La République de nos rêves n'était assurément pas celle que nous avons. Nous la voulions démocratique et sociale, et non pas ploutocratique. Nous entendions en faire l'instrument de précision de la transformation économique. République était pour nous synonyme de régénération. Au milieu des ruines fumantes de la patrie, il nous semblait nécessaire et juste de disqualifier sans retour les hommes et les institutions qui avaient amoncelé ces ruines. Il nous fallait des écoles nouvelles, une morale nouvelle et des guides nouveaux. Travail pour tous, éducation pour tous, défense nationale pour tous, confiance inébranlable dans les destinés de notre race, - tel était le mot d'ordre qui surgissait spontanément du cœur de Paris exsangue et qui s'incarnait à ses yeux dans la République.

Le siège nous avait laissé militairement organisés ; c'est pourquoi notre révolution fut à la fois militaire et civique. Les classes dirigeantes venaient de donner la mesure de leur criminelle incapacité , c'est pourquoi notre révolution fut prolétarienne et a marquée le fait pivotal des temps modernes, dans l'avènement direct des travailleurs au mystère de pouvoir.

Quant à la Commune, pour nous comme pour ceux de 1792, c'était l'organisme occasionnel et provisoire qui naît aux heures de crise pour prendre en main l'évolution sociale et la conduire à terme.

Comment la lutte s'engagea et quelles en furent les péripéties, vous le savez. Grâce à la complicité de l'Allemagne, qui rendit tout exprès ses trois cent mille prisonniers à l'Assemblée de Versailles, Paris succomba sous le nombre. Mais il avait du moins, par son héroïque effort, donné à la France républicaine le temps de se ressaisir. Des engagements formels avaient dû être pris par Thiers avec les délégués des grandes villes frémissantes. Quand le sang de nos rues fut lavé, il se trouva que le programme de Paris était le seul pratique.

C'est ainsi que de notre holocauste, de nos douleurs et des larmes de nos mères fut cimenté le pacte républicain.

Entre temps, la loi municipale avait été votée : sur ce point encore, Paris gardait gain de cause.

Quant à la transformation économique, pour un quart de siècle elle était ajournée. Mais qui oserait dire aujourd'hui qu'elle n'est pas restée inévitable ! La misère grandit avec le progrès mécanique ; dans cette France si belle, des milliers de bras inoccupés ; le malaise de toutes les classes se trahit par des symptômes chaque jour plus évidents. L'impuissance des vieilles formules, l'incohérence des institutions et des faits éclatent aux yeux. L'heure approche où sur cet article aussi, le programme du 18 mars va s'imposer par l'irrésistible force des choses. Cette heure sera pour nous, qui avions voulu l'avancer, celle de la justice historique.
Paschal Grousset

Note de l'éditeur : Malheureusement à notre connaissance le livre évoqué est resté à l'état de manuscrit. 

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13 novembre 2008 4 13 /11 /novembre /2008 14:28

livre olympeCe début de texte d’Olympe de Gouges date de 1788. Il montre la lucidité de cette femme sur l’état révolutionnaire du pays, sa vision sentimentale de la politique qui ne doit pas arrêter le lecteur, son engagement clair et net aux côtés du Peuple pour tenter d’apaiser les conflits, un engagement allié à un sens patriotique. Ce début de texte entre dans un cycle de publications d’œuvre d’Olympe de Gouges que les Editions La Brochure vont entreprendre pour poursuivre leur activité féministe.

 

 

Remarques patriotiques

 

Par la Citoyenne, auteur de la lettre au Peuple

 

Ma lettre au Peuple, ou le projet d’une caisse patriotique, a ému les belles âmes. Elle a excité la critique des mauvais Citoyens. Ils osent même dire que le caractère français est éteint, et que l’égoïsme est actuellement l’esprit dominant de la Nation. Ah ! s’il n’a pas brûlé jusqu’à présent pour la Patrie, il peut renaître de sa cendre. La France a peut-être été trop florissante jusqu’à ce siècle ; elle a excité l’envie de toutes les nations, et pour un choc violent qu’elle éprouve, faut-il qu’elle se perdre elle-même ? O France, France ! Relève ton front altier, et n'inspire point à tes voisins le sentiment de la pitié. Que le Peuple, les Parlements et le Roi ne forment quune même famille, et la Nation reprendra bientôt sa première splendeur. Et vous, ennemis de vos frères, de votre Roi et du repos public ; étouffez cet esprit de révolte et de discorde, qui n'entraînerait que votre perte, et la chute de l'Etat. La misère n'a déjà que trop affligé votre Pays ; craignez d'allumer les flambeaux de la guère, et de périr les premiers dans une infâme boucherie. Mes avis ne sont point bizarres ; c’est en employant les matériaux de la vérité, que je prétends démontrer le danger, le bon, et l’utile. C’est une femme, qui ose se montrer si forte, et si courageuse pour son Roi, et pour sa Patrie.

La France est plongée dans la douleur ; le Peuple souffre et le monarque gémit.

Le Parlement demande les Etats-Généraux, et la Nation ne s’entend pas. Ils sont indécis sur la manière de s’assembler. Toutes ces altercations sont des entraves au salut que l’Etat attend de leurs lumières. Le Tiers- Etat avec raison prétend avoir autant de voix que le Clergé et la Noblesse, mais la dignité de ces derniers ne veut point entendre que les organes du Peuple sont des voix aussi salutaires que les siennes à l’administration des Finances, et aux prompts remèdes qu'on doit porter à un mal qui s’empire tous les jours. Il me semble voir un malade dans son lit, à qui il faut une prompte opération. Un habile médecin l'ordonne sur le champ ; mais les parents qui ont souvent des vues contraires à celles du sage Médecin demandent une consultation de ce qu’il y a de mieux dans la Faculté, sur la manière de faire l’opération. L’auguste Assemblée d’Esculape ne s’entend pas. On disserte longtemps ; le mal devient désespéré, ou le malade périt ; et le bon médecin est le Tiers-état. Messieurs les Nobles, sont l’auguste assemblée des Médecins, à qui je représente, avec les droits que mon sexe me donne, de laisser de côté le rang, les titres, et ce vain préjugé de ses dignités idéales, et voler en foule faire l'opération du Royaume, chasser le mal, et introduire le bien.

Voilà sur quelles conséquences il faut discuter. La supériorité doit se taire, et faire place à la raison ; et dans une semblable calamité, Barons, Marquis, Comtes, Ducs, Princes, Evêques, Archevêques, Eminences, tout doit être citoyen ; tous doivent donner l'exemple de cet amour patriotique au reste de la Nation, pour concourir ensembles au bonheur de l’Etat et à la gloire de son Pays.

Le bien est-il donc si difficile à faire ? Oui, sans doute, les Parlements et le Souverain en font la triste expérience ; mais je l’ai déjà dit, que le Roi et les Parlements ne forment qu'un même cœur, et l’âme de la Patrie se signalera. Et pour mieux vous toucher de cette vérité, Puissances supérieures aux peuples, considérez le tableau effrayant que je vais retracer à vos yeux du plus grand nombre des citoyens. Le commerce est écrasé, une quantité incroyable d’ouvriers sont sans état et sans pain, que deviennent-ils ? Pourriez-vous vous en rendre compte sans frémir ? Tout est arrêté, le riche impitoyable cache son argent ; vil instrument de sa cupidité, peut-il prolonger ses jours, peut-il les rendre plus heureux ? Ces trésors dans l’inaction quel bien peuvent-ils faire à personne ? C’est à l’Etat qu’il faut les offrir, et les offrir sans aucun intérêt, tel qu'ils les placent dans leur coffre-fort. Dans la caisse de la nation, ils vous rapporteront un prix au-dessus de leur valeur, vos collatéraux, après vous, s'applaudiront de trouver dans votre fortune de tels recouvrements, vous leur laisserez la gloire et les honneurs qui éterniseront votre mémoire. Si une si belle victoire n’émeut point vos âmes abjectes, craignez le désespoir des malheureux et des révoltés. Vous ne sauriez vous le dissimuler, c’est toujours sur les riches qu’ils portent leurs mains hardies et meurtrières, et souvent dans leurs fureurs ils ne distinguent plus les bons d'avec les méchants.

Dans un Etat de Monarchie, tel que la France, le peuple ne peut être heureux qu’autant que l'Etat n’est point obéré ; la vraie constitution est fondée sur l’amour de son pays et de son Roi : voilà les Francs, voilà leurs véritables vertus. Si elles n'existent plus dans la nation, la nation est perdue, elle sera livrée au pillage des brigands, et peut-être soumise aux puissances ennemies.

C’est donc à vous, grands, sages, bon citoyens à détourner les maux que je redoute pour ma Patrie. Il se peut que mon cœur pénétré ne soit trop alarmé de ses craintes, et que cette crainte m’ait fait voir un danger évident. Ah ! Combien de fois les Etats se sont perdus, faute de prévoir les grands événements ! Ce sont de ces causes célèbres où chacun est intéressé et le parti le plus puissant doit entendre et recevoir avec plaisir les avis du parti le plus faible. C’est sur les intérêts du public et de l’Etat qu’il faut se prononcer ; mais en se prononçant, il faut les unir et les accorder, et si vous les divisez, vous les perdez tous les deux. Je sais que dans un temps heureux les maximes de l’Etat sont différentes de celles du public et que la politique du gouvernement ne permettrait point aucune observation relativement à ses administrations, mais devenu plus humain que politique, plus sage que vain, il écoute et reçoit avec plaisir les avis de chacun, quand ils ne tendent qu’au salut général. Le premier instant des têtes citoyennes produit quelque fois les plus grands revers ; mais leur retour sage et salutaire répare bientôt un instant de fermentation. Tel [C’est ainsi] qu’on voit actuellement les arrêtés des Parlements. Le mal s’est empiré par trop de zèle ; mais ce mal peut se réparer par ce même zèle. Unissez-vous donc, messieurs, et ne perdez point de vue l’impôt volontaire, et quel que faible que soit l’Auteur dans ses rayons de lumières, ils n’en sont pas moins utiles pour le bien de la France. Souvent les moyens les plus simples ont produit de grands effets ; craindrait-on de les employer, parce qu’ils sont faciles ? Craindrait-on de les mettre en exécution, parce que c’est une femme qui les propose ? Craindrait-on d’obscurcir l’éclat de la Couronne, en offrant à son roi un don pur et volontaire, quand il peut, à son gré, créer des impôts ? Y a t il plus à rougir de recevoir de la part de ses sujets un service, que de les forcer la baïonnette au bout du fusil de vous l’accorder ? Il me semble que les impôts sont ainsi exécutés, ou je ne me connais point en matière politique. Il me semble aussi que dans les temps de guerre, différentes villes maritimes ont offert au Roi des vaisseaux qu’il a acceptés sans rougir, et je ne vois pas de différence avec le projet de caisse patriotique pour la dette nationale, ou je n’ai point l’ombre du sens commun. Craindrait-on que cet impôt n’eût point l’effet que j’en promets ? Et quand cela serait, par ce moyen on s’instruirait du véritable caractère français. Cette expérience serait peut-être très utile à l’Etat et à la Nation, et ce moyen facile, sans effets, donnerait sans doute des points de vues pour ceux qui conviennent actuellement.

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29 octobre 2008 3 29 /10 /octobre /2008 14:44

jacques desmaraisJacques Desmarais dévoile ses « Poèmes cannibales »

par Yvan Fortin

 

C’est dans un Bistro In Vivo débordant de paroles et d’énergie que le poète et communicateur Jacques Desmarais a lancé, le 9 octobre, son premier recueil intitulé Poèmes cannibales; loin dans ma campagne.

Dans ce livre de 140 pages, publié aux Éditions La Brochure (ISBN,978-2-917154-31-1), l’auteur propose une sélections de 32 poèmes inspirés de la vie et dont l’écriture s’échelonne de 1976 au printemps 2008. Ce lancement s’est déroulé dans une ambiance de fête grâce, entre autres, à la collaboration musicale de Paolo Duchesneau. L’événement a aussi été agrémenté de quelques lectures poétiques.

« La publication de ce recueil est pour moi comme une traversée du miroir. C’est le passage de mes poèmes de la sphère privée à celle publique. Mes textes s’échappent vers le monde collectif », a confié l’auteur quelques minutes avant de monter sur la scène du In Vivo.« J’ai été inspiré par les surréalistes et les automatistes, dont Michel Garneau. Avec le temps, mon écriture a pris de la maturité. Je pense que mes images sont mieux construites. Même si j’utilise le ″je″, mes textes font une large place à la fiction tout en restant près de la vérité. »M. Desmarais voit d’un bon œil la popularité du slam. Cet art urbain est une parole vivante, une littérature vécue dans l’instant qui donne accès à l’émotion; un genre poétique basé sur une rencontre entre le poète et le public.

« Le slam dépoussière la poésie et la forme. C’est très motivant de voir ces jeunes faire de la poésie. »Né à Béthanie, Jacques Desmarais vit à Montréal où il a étudié la philosophie et l’éthique appliquée. Il s’est toujours intéressé de près à la poésie et s’est produit sur plusieurs scènes de la métropole, au fil des ans. À travers l’émission de jazz et de poésie Train de nuit, diffusée à Radio Centre-ville, et dont il était le coanimateur, il a partagé sa passion pour cet art souvent méconnu. Sur son blog, il continue à entrelacer le jazz, le slam et poésie dans le ciel culturel montréalais.

Levez le voile sur l’univers poétique de Jacques Desmarais en visitant son carnet électronique au jack-jackyboy.blogspot.com

Source :

http://www.flambeaudelest.com/article-261261-Jacques-Desmarais-devoile-ses-Poemes-cannibales.html

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29 octobre 2008 3 29 /10 /octobre /2008 14:35

  jacques desmarais

Trois semaines de silence sur ce blog car nos éditions étaient en voyage aux Amériques pour, entre autres activités, présenter notre premier livre de poésie. Voici une présentation de l’auteur en attendant mieux.

 

 

Jacques Desmarais, poésie-sucrée

 

En publiant le livre Poèmes cannibales Loin dans ma campagne, les Editions La Brochure n’ont pas souhaité rendre hommage à un ami mais à un poète qui se trouve être aussi un ami.

Qu’est-ce donc qu’un poète ? N’ayant qu’un contact très irrégulier avec la poésie ma réponse n’a ici d’intérêt qu’à cause de ma découverte d’un poème précis du recueil : Magnolia Blues. En quelques vers, je sais que Jacques y raconte sans tricher un seul instant, une année de sa vie. Le poète c’est d’abord une sensibilité à fleur de peau qui souvent vient de l’enfance. Alors le poète devient langue : « Le français ici n’a pas d’horloge / goûte le pétrole sur la Baie de l’Atchafalaya ».

La poésie est un effort permanent, une relecture infinie. Oui elle existe la baie de l’Atchafalaya, oui le pétrole en est devenu le rythme des bras qui pompent. Oui il existe « le baiser d’une méchante tornade / qui a piqué à travers champ / comme une jument en calvaire ».

Pourquoi un baiser et non un coup de fouet ?

Entre peur et peur, fidélité et fidélité, Jacques, poète par la naïveté qu’il transporte toujours avec lui, nous oblige à distinguer sa naïveté audacieuse d’une autre très paresseuse.

Le poète effarouche le bavardage surtout quand « il pue la canne à sucre / et les marécages ». Il cherche alors une langue qui se perd, celle de sa mère, de sa voisine. Pas de poètes sans l’intimité d’une langue à reconstruire. « Ajoute du vrai / au langage, / Car la Louisiane / d’où je t’écris… / me fait bander à part ! » Et voilà que le poème s’achève et la construction devient un monument quand on a aussitôt envie de recommencer la lecture. Je ne prétends pas avoir la même sensation avec tous les poèmes, cette sensation sucrée qui incite à en reprendre. Quel drôle d’aliment ce sucre si génial qui pue pourtant énormément au moment de sa fabrication !

 

Une sensibilité, une langue, une construction…, quand un poème vous ouvre une porte d’univers alors vous pouvez vous lancer dans un autre voyage comme dans « la coulée des angevins ». Si Jacques aime parler de poèmes-récits en voilà un où le récit n’est pas très linéaire et n’a rien d’une coulée où tout d’un coup déboule «  un zeste de poussière sur tes restes de viande séchée… ». La chute finale « Nous vaincrons » relance la lecture en quête d’un « nous » et d’un objectif incertain de « victoire ».

 

Bien sûr je pourrais invoquer, pour dire le poète Jacques, le mot de Michel Garneau qui introduit le livre, qui est en fait un acte puisque ce talentueux personnage a accepté de lire à la radio des textes de cette « voix authentique ». Garneau écrit aussi : « ces poèmes qui ne peuvent pas avoir été écrits ailleurs qu’au Québec et par le dénommé Jacques ».

 

Avouons-le : qu’un petit éditeur français accepte de donner un coup de pouce à une voix québécoise en 2008 à de quoi surprendre ! « je lancerai ma bouteille à l’humanité » dit Jacques car pour lui être québécois c’est le meilleur moyen de s’adresser à l’humanité contrairement à d’autres qui pensent utile de policer leur français pour mieux s’adresser à l’humanité.

 

Jacques est devenu poète très jeune et les amis de ce temps là qui l’entourent encore disent que c’est par la chanson qu’il passa au poème, la chanson toujours au cœur de la parole de son pays qui est l’hiver. Jacques préfère invoquer la découverte de la parole possible, la sensation tout d’un coup que sa vie d’enfant de paysan était une part de l’art. Alors le poète monte sur une table et tout commence ou tout fini. Tout commence car le coulée d’angevins est là devant. Tout fini car jamais Jacques ne pourra sortir d’un univers « Cailloux réverbères / échangés par les fenêtres de l’invisible ».

 

A la présentation de son livre le 9 octobre, j’ai découvert un nouveau Jacques qui mangeait les mots de ses textes comme d’autres dégustent les meilleures pâtisseries. Mais c’est une autre histoire pour la semaine prochaine. 25 octobre 2008 Jean-Paul Damaggio

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25 septembre 2008 4 25 /09 /septembre /2008 08:27

M-J Colet Femme en retardLes Editions la Brochure viennent de publier une autofiction de 300 pages écrite par Marie-José Colet qui vous la présente par ce court texte.

 

BON DE COMMANDE Editions La Brochure

 

La femme en retard

 

La femme en retard. Il s’agit du deuil que fait une femme, Clara, de sa mère, Flora. Le point de départ de chaque partie en est une année. Clara retrouve Flora à partir des années de la vie de sa mère. Nous sommes tous des temps, entre notre vie et notre mort. Clara va donc découvrir dans un retard douloureux les temps de sa mère, et dans le mouvement des années de Flora, elle se retrouvera dans son temps, dans son histoire et dans son identité.

Dans cette autofiction, j’ai travaillé le retard que nous avons tous, les uns par rapport aux autres, mais aussi le retard que nous prenons dans notre propre vie, tant nous sommes faits d’amour, de joies, de chagrin, de projets, tant nous sommes pris par nos propres années à vivre.

Le livre se déroule entre 1943, date d’une lettre écrite par la grand-mère de Clara, la veille de son départ vers Sobibor et l’année 2005 où Clara se retrouve avec sa famille devant le mur des noms, lisant le nom inscrit de sa grand-mère.

Entre ces deux temps,  j’ai écrit des chapitres et des années que je vous laisse découvrir par une lecture attentive et heureuse, j’espère, malgré la tristesse de mes propos.

J’ai voulu terminer cette autofiction par l’espoir que nous laissent  ceux qui dans leur quotidien oeuvrent à construire et à créer.

J’ai souhaité écrire un roman sans colère et sans haine, j’ai souhaité poser un acte de paix, un acte de femme disant non à la guerre qui de génération en génération transmet larmes et folie pour les survivants. J’ai souhaité que mon personnage Clara, en retrouvant sa mère Flora retrouve sa propre histoire, son temps et sa sérénité pour qu’à partir de son passé douloureux, elle puisse vivre un avenir généreux tourné vers tous et auprès de ses compagnes les femmes.

 

Marie-José Colet

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19 septembre 2008 5 19 /09 /septembre /2008 14:11

A la page 27 et 29 du dictionnaire fientifique d’économie sociale et politique, Max Biro se moque de la « banque pipilaire » d’où est née cette autre banque d’investissement dénommée Natixis. « Sonnez trompettes, roulez tambours, ainsi naquit Natixis. C’est une filiale (de la Banque Populaire-Casen), elle est cotée en Bourse, tout de suite elle cherche l’actionnariat populaire ! Mais le dépliant en petites lettes dit que c’est ouvert à l’Amérique ! » Et la conclusion met en garde contre cette dérive financière annonciatrice de déboires.

 

Dictionnaire fientifique (suite)

 

 

Aujourd’hui Natixis est victime de la crise des crédits à risque (nommés généralement subprimes pour aider à comprendre…) et appelle la Caisse des dépôts à la rescousse. Les syndicats négocient la suppression de 800 emplois e interne et autant parmi les prestataires extérieurs. La naissance de Natixis c’était le bonheur au rendez-vous en conséquence Max Biro ajoute son humour à la situation en refaisant parler ses bécasses et son vieil oiseau noir.

 

Natixis suite de la page 27

 

Les deux bécasses triomphaient pleines d’admirations et répétaient lassantes une comptine « Natixis natixis escrocrisse, escrocrisse, les subprimes dans le cul, Natixis je te pisse ».

« Plait-il ? » dit le vieil oiseau noir perché sur le portail fermé d’une maison de classe moyenne d’un enseignant moyen de la FSU.

« O vieil oiseau noir prémonitoire ! Page 27 du dictionnaire fientifique tu annonçais le naufrage moral et matériel de Natixis. O vieil oiseau noir ça y est nous y sommes !  

Les bécasses reprirent « Natixis au cul je te pisse, acheté l’orviétan, jouez, jouez votre argent, Caisse d’épargne, Banques populaires, Casden, jouez au poker, au tric trac, à la bourse, au casino, à chat perché.»

Un passereau de Garonne qui avait parcouru pays, océans et mers, conclut :

«L’ action paie… Pas à la Bourse mais dans la rue ! »

 

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7 juin 2008 6 07 /06 /juin /2008 09:29

Slimane AzemA paraître fin septembre 2008 : Slimane Azem, Le peuple en chansons. Une brochure de 82 pages pour établir un pont entre notre société et ce chanteur kabyle. En attendant voici un écho d’un concert.

 

Slimane Azem, le peuple en chansons

 

Le lieu, un village. L’association qui organise : un certain bout du monde. Sur scène Origines Controlées. Il s’agit de chansons de l’immigration algérienne. La vedette est décédée depuis 1983 et sa tombe se trouve à une dizaine de kilomètres, à Moissac, Tarn-et-Garonne. Elle s’appelle Slimane Azem. S’il avait été là, en ce 6 juin 2008, il aurait ouvert de grands yeux. Comment un public aussi divers peut-il vibrer à sa musique, à ses mélodies ? Pourtant, cheveux blancs et noirs, peaux blondes et sombres, tout le monde danse. Sur des paroles en kabyle ! Bien sûr avec Slimane, on retrouve la grande famille des chanteurs kabyles d’Aït Menguellet à Idir en passant par l’inévitable Matoub Lounès.

La première fois que j’ai entendu parler de Aït Menguellet c’était en 1992 dans un journal algérien, sous la plume d’un journaliste qui comme beaucoup d’autres trouvera ensuite refuge en France : S.A.S. Il racontait un stade plein, 10 000 personnes pour un concert dont les recettes devaient venir en aide aux habitants pour améliorer l’accès à l’eau. Depuis, à suivre ce filon, je retrouve à chaque pas le peuple en chansons.

Mouss et Hakim, les deux chanteurs du groupe Origines Contrôlées, ne diront pas autre chose : Slimane Azem était le chanteur que leurs parents écoutaient sans cesse. Le père maçon leur avait appris un proverbe : ou tu travailles à l’école ou ça sera la pelle et la pioche pour vous ! Et finalement ils chantent le peuple debout, le peuple cultivé même s’il était illettré.

 

Slimane Azem est un homme à l’histoire tourmentée. Fils de paysans, paysan lui-même, il deviendra à un moment propriétaire d’un café à Paris où il chantera pour les siens, pour sa grande famille. Depuis longtemps, il composait, écrivait, chantait mais grâce au café (comme d’autres qui bénéficièrent du café-concert) il peut atteindre un public plus large, toujours plus large jusqu’à la scène de l’Olympia.

 

A Garganvillar le public aura droit à deux chansons de Slimane : Le bœuf et la carte de résidence. La première est une fable d’un admirateur de La Fontaine. Car ainsi vont les cultures : dans un magnifique village de Kabylie un homme à l’école coloniale s’enthousiasme pour le fabuliste français et se sert de ce savoir pour broder sur sa culture populaire qu’il transporte en France !

 

Car les deux chanteurs d’aujourd’hui le répètent partout : quand ils chantent ce répertoire ils chantent une part de la France qui n’a jamais été seulement de langue française. Et si le Kabyle s’ajoute au breton et à l’occitan (Idir a beaucoup chanté avec Alan Stivel) vive la France. Combien de fois Slimane s’est mis à écrire une chanson sur le bon mot d’un de ses amis ? Il portera toujours avec lui son Algérie qu’il chante sans cesse, mais il chante de France et la plupart des immigrés qui s’identifient à lui, qui se retrouvent en lui, sont en France et Français.

 

Et dans ce village de France où le public danse au son de l’accordéon comme au son de djerbouka c’est pas un club de tourisme qui propose un détour folklorique. C’est la vie d’aujourd’hui, la fête forte des rythmes de partout. Mouss aime le répéter : le bal musette dont Garganvillar est un haut lieu, n’est que la rencontre entre une musique populaire d’Auvergne et des accordéonistes italiens. Cette identité de la France enfermée dans un troisième âge historique est elle aussi un croisement. Ne disons pas un mélange car quand on mélange on se perd et le peuple n’a pas à se perdre. Le mélange c’est la culture coca (light ou pas) forme bien connue de cocalisation, c’est le poulet pour tous forme achevée de la gastronomie perdue. Le peuple de partout avait auparavant sa gastronomie même si comme pour le jeune Slimane elle était surtout faite seulement de figues ou d’orge. Ce concert d’un soir je vous propose de le déguster avec un texte d’un écrivain rare Areski Metref qui tient chronique dans le Soir d’Algérie (il fut à Politis pendant toute une époque) et qui publia un texte hautement beau sur Slimane Azem vu cette fois de son pays. 6 juin 2008 Jean-Paul Damaggio

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5 juin 2008 4 05 /06 /juin /2008 09:37
Harari-BiroLe décès de Clément Harari

 

Clément Harari, acteur de théâtre puis de cinéma vient de décéder. Au cours de sa vie il croisa dans le Gers Max Biro et ils se racontèrent leur vie. Max décida de publier le récit de la jeunesse de l’artiste et c’est devenu, publié aux Editions la Brochure : La jeunesse de Calmoun, format A5, couverture couleur (une peinture de Max) 144 pages, 12 euros. ISBN : 978-2-917154-11-3

Nous vous offrons ici le premier chapitre de ce livre.

 

" Brahim conduisait une vieille Hillman des années 50, pas trop pourrie, poussive, un peu cabossée, rouillée, petite pour un taxi.

Il allait vers l'aéroport.

Le mois précédent, il avait trouvé un américain, l'avait transporté, 15 jours, avait rendu services, hôtel, restau, kif, putes : «une fille de la bonne société, 17 ans, pas cher»... « Un petit jeune, non ? »

Il avait payé ses retards de loyer avec le plumage du pigeon.

Brahim arrivait vers la station de taxis de l'aéroport.

Il vit, son prochain client.

«OUI BON ! Yom saïd».

 

Sur le trottoir, un homme, sa valise ouverte, laissant les chemises, une trousse de toilette se répandre dans la poussière, les papiers gras et les mégots.

L'homme avait une soixantaine d'années, pas grand, plutôt gros, rouge de teint, ce rouge des rouquins, teint immuable quand les cheveux sont devenus blancs, une petite barbiche de docteur de Western, un short.

Il était accompagné d'une femme pas très jeune non plus, habillée de clair, très hiératique, irritée de la maladresse de son mari, une femme qui avait été belle, très belle.

 

Brahim planta son taxi là, courut, prit les choses en main, aida à remplir la valise, la referma à peu près.

«Come on, taxi, not expensive, come on, come on».

La femme fit oui de la tête, l'homme reprit la direction des opérations : “Garden city !”

«Garden city OK...». Brahim ouvrit les portes, cérémonieux, rassurant, jeta les deux bagages dans le coffre.

Il allait démarrer.

Un flic l'accroche, «à la queue, tu maraudes, YA 'ars Décharge tes clients vite, vite ! »

« Va te faire enculer».

Des cris, du bruit, une bagarre, le flic s'en va.

Brahim démarre... Brahim à haute voix « Bon pigeon » et souriant, «Hôtel, Sir, GOOD HOTEL ?»

«Garden city !»

«Seventeen kilometers to Cairo Mister, Heliopolis Great circulation, modern, Egypt ! Great country ! Tomorrow, with me, look, beautiful palace !»

 

Le bruit rendait fou Harari, il avait vu le désert, il y a trente ans, ici.

Du taxi, il ne voyait pas l'Egypte de son enfance. L'Egypte n'avait récolté que des moissons de voitures rouillées, embouteillées, et un bruit de cataracte de klaxons.

Le taxi traversait Héliopolis à lentes séquences de routes et de ralentissements, d'arrêts.

Ils passèrent devant une synagogue délaissée.

Le Baron Empain avait dit :

« Je veux être enterré au Paradis terrestre ».

Ici ! Qu'est devenu le Paradis terrestre ?

«Beautiful Egypt, you understand ?»

Harari écoutait cette langue de cuisine et d'aéroport, qui envahit le monde et se limite aux échanges de touristes et aux changes occultes de dollars.

«Mon brave. Te fatigues pas en Anglais ....... Je suis né ici».

Brahim dans sa surprise freina, le conducteur qui le suivait à quinze mètres dans une guimbarde, se mit en travers pour l'éviter et injuria Brahim :

«Qu'une datte noire entre dans le cul de ta mère, la fille de chienne en chaleur, par devant et par derrière ! »

Toute l'adolescence d'Harari l'envahissait à écouter les deux conducteurs.

Les deux voitures se bloquaient côte à côte, feu rouge exceptionnellement respecté ou accident en aval.

Harari baissa la vitre : « Ne t'en fais pas c'est ma faute haak 'aleya».

«Walla» «tu es vraiment Egyptien !»

«Je m'appelle Harari, Clément Harari, ils disent en Europe, ici Calmoun, Calmoun Harari, j'étais le jeune Calmoun, comme ton père et le père de ton père et de son père, aussi loin que tu veux, en djellaba.»

Que reste t'il du petit Calmoun dans ce vieil Harari ?

Il se revoit enfant, sur le balcon de la maison de ses parents à Héliopolis, le balcon d'en face était tout proche, de la rue montait une clameur.

Il voyait comme hier, la foule, les drapeaux rouges, le fleuve à ses pieds de petit garçon de cinq ans, les grands tissus qui flottaient.

Il serrait sa petite main sur la peinture écaillée noire de la fonte ouvragée, un cri que dans un premier temps, on ne distinguait pas dans la clameur, était scandé puis psalmodié : «Saad, Saad».

Toute sa vie le sentiment de fraternité et d’exaltation monterait en lui lors des mouvements populaires, viendrait comme un écho de ce jour, première scène d'un immense opéra, il se raccrocherait, emporté par les flots, parcelle infime !

Fraternité envahissante ressentie, côte à côte, amour romantique, il le cherchera, donnant à sa raison les raisons raisonnables, nostalgie.

Sa mère, les cheveux gris tirés en chignon bien serré, robe bien coupée, moderne, occidentale ou bien jupe et corsage blanc repassé, légèrement empesé, sa mère venait le prendre par la main et le faisait rentrer, dans la grande salle à manger, fermait la fenêtre de la rue.

Elle n'aurait pas pensé révolution, elle ne savait pas ce que c'était.

C'était incongru ce ronflement de la foule, du peuple, alors elle le faisait rentrer.

 

C'était une famille ouverte, allant vers le progrès, mais elle cuisinait pour tous dans une cuisine, petit recoin, sur des réchauds à mèche, orientaux.

Cette femme, pondait tous les deux ans, régulièrement un petit Harari, heureuse pour un garçon, supportant le coup du sort pour une fille !

Comment aurait-elle pu savoir ce qu'étaient ces fleuves d’espérance et de colère se brisant sur le protectorat britannique.

Elle ne savait pas se servir de l'argent, confondait les pièces. Elle ne sortait pas.

Elle ne faisait pas le marché.

Elle vivait une vie parallèle avec les autres femmes de la famille. Elle allait au temple, le samedi, séparée des hommes.

Elle venait d'Alep, ils n'étaient que des Juifs si semblables et si différents des Arabes.

Tout petit enfant avec les Teffilims, et le Talet, toutes les fêtes, toutes, venaient, Pourim, Yom Kippour, Pessah, Souccoth.

 Sa mère l'avait mené jusqu'à la table, ses frères et sœurs tous plus vieux, six, étaient déjà assis.

Son père avait une assiette, symbolique, mais repérait un morceau, et le piquait, seigneurial, chez l'un ou chez l'autre. La mère durant le repas, servait le repas debout toujours debout, derrière son monde, attentive, invisible, présente.

La table était chargée de plats différents aux préférences de chacun, des fils d'abord, mais les filles étaient à l'assaut de leur égalité.

Youssef, appelait la bénédiction de l'Eternel sur la famille, au Shabbat, tous les jours goûtait dans le silence, un premier morceau regardant sa femme, sentencieux oracle, disait : «bien, un peu trop de sel».

Elle ? Elle avait l'impression d'avoir perdu son honneur. Il goûtait alors le riz, le riz quotidien, le Maréchal des aliments. S'il semblait être satisfait, elle retrouvait son active sérénité.

Toujours inflammable, elle se mettait à se plaindre, se lamentant, «Pourquoi es-tu mon mari ? », elle se dirigeait vers la fenêtre, menaçait de se jeter, pour mettre fin à une si terrible vie, puis dans l'indifférence générale, après une scène de vingt minutes, pleine d'imprécations, de lamentations, retournait comme si de rien n'était à ses travaux.

Lors du mariage, le beau-père n'avait-il pas dit la formule rituelle : «Prends la, elle sera esclave en ta cuisine».

 

 

La politique entrait le long de ces repas, le père au courant du moindre fait, en dissertait avec les aînés, garçons et filles, s'opposait ou approuvait les interventions de ses amis invités, mais d'une manière à la fois éloignée partiale et passionnée, ou tel un sage talmudiste serein et désincarné.

L'enfant savait qui était président du conseil en France, quel était le premier port exportateur de riz (Rangoon), ce que faisait la chambre bleue horizon, ce que fut la première révolution russe de 1905, qui était Bêla Kun, l'éphémère dictateur rouge Magyar.

Mais bientôt, la famille quitta Le Caire. "

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5 juin 2008 4 05 /06 /juin /2008 09:29

Valse du hérissonLa valse du hérisson

 

Par un hasard de la vie, Démocrite fut invité à tenir chronique quotidienne sur un journal courant 2007. Il a rassemblé les textes en question, publiés par les Editions La Brochure sous le titre d’une des chroniques, celle que nous vous offrons. La Valse du hérisson, 164 pages, 15 euros, ISBN : 978-2-917154-13-7

 

 

Et voilà, c’est reparti, sur nos routes empoussiérées, se dodelinent ces petites bêtes non pas à poils ni à plumes mais à piquants que l’on nomme communément hérissons. Mâles ou femelles, petits ou grands, ces grands pourfendeurs de couleuvres, insectes et autres viscosités rampantes ont le chic et le choc pour surgir du bas-côté sous nos roues crantées.

Immanquablement le résultat ressemble à une bouillie informe d’où émerge de ci de là, un museau, une patte figée dans la mort motorisée. Je n’ai pas de tendresse particulière pour ces animaux, si ce n’est que je tente de les respecter pour leur contribution à Dame Nature et que je regrette profondément que leurs pas menus les portent systématiquement sur nos départementales asphaltées à leurs risques et périls. Le péril est bien souvent le lot de ces charmantes bestioles. Par ailleurs, je ne résiste pas au plaisir d’un audacieux parallèle entre cette existence vouée à la recherche d’insectes et à la nôtre tout aussi périlleuse quand à la somme des dangers qui nous guettent sans cesse : guerres, maladies, accidents, tromperies et autres inventions dont l’Homme a le secret. Nous passons tellement de temps à vouloir traverser la vie avec nos aveugles passions que nous avons parfois du mal à voir le transport qui nous écrasera au mitant du parcours. Notre besoin affiché de battre sans cesse des records de vitesse, de richesse, de pouvoir nous fait oublier le sens même d’une vie trop souvent ternie par les vicissitudes du quotidien.

Pareil au hérisson qui s’empresse de traverser sans se soucier du monstre métallisé qui se présente au loin, nous avons une propension extraordinaire à courir après notre perte sans jamais prendre le temps de regarder à droite, à gauche avant de nous engager. Le hérisson signe une fois sur deux sa perte ! Puissions-nous ne pas faire de même et nous préserver de toute illusion quand il s’agit de traverser le gué ! Puissions-nous montrer autre chose que nos piquants pour exister !

J’ai ramassé le cadavre du hérisson mort devant mon portail, et pour ne pas laisser au bord de la route ceux qui n’osent franchir le pas, je vous invite à construire un monde où personne ne sera écrasé, écarté, oublié en chemin. 

Cet hérisson a cessé de vivre et n’a pu se défendre malgré ses piquants et ses pattes étaient mues d’une dernière pulsion à son agonie. Gageons que les hommes et les femmes que nous côtoyons chaque jour se choisiront enfin un autre destin et qu’ils refuseront l’inéluctable pour ne pas être un jour… au bord d’une route !

Les violons jouaient un air joyeux de Johann Strauss, une valse, je crois ! Et nous nous souvenons de cette autre guerre…

Le 5 mai 2007

 

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