Le 23 mai 2013 une demande de permis de construire est déposée en mairie de Montech pour la construction d'une usine à Borde Basse. Le terrain n'est pas constructible mais miracle, en octobre 2013 il le devient ! C'est normal c'est pour un projet ce qu'il y a de plus beau, de plus génial et de plus moderne. Du moins c'est ce que révèle le dossier d'enquête d'utilité publique, mais sur le terrain en question personne n'a pensé à installer un beau panneau indiquant : "Ici en 2015, une magnifique usine sera installée" si bien que les riverains s'informèrent par hasard, jusqu'au moment où, la colère montant, le commissaire enquêteur décida de prolonger l'enquête d'utilité publique et d'organiser la réunion de ce jour, 2 décembre 2013. Une telle réunion n'aurait-elle pas due être en amont ? C'est ce que pense visiblement les 400 personnes présentes dans la salle dont le débat révèlera qu'elles sont allées chercher derrière les mots du dossier.
Informer c'est confronter les points de vue
Pourquoi, en de telles occasions, la présentation est seulement celle des défenseurs du projet et non celle des deux approches, promoteurs et opposants ? Car ainsi on a d'un côté les promoteurs "défenseurs de l'intérêt public" et de l'autre les citoyens de la salle accrochés seulement à "l'intérêt particulier" ? Pour faire pédagogique, l'usine serait en fait "une vache en béton" : elle avale des déchets, elle digère et il en sort du fertilisant local. Il y a 8000 usines de ce type en Allemagne et nous sommes seulement à 300 en France.
Pour les documents de l'enquête pourquoi sur le site de la préfecture n'y a-t-il qu'un résumé technique et non le document complet ? Bien souvent il a été fait référence à des arrêtés préfectoraux mais comment y accéder facilement sur le site de la préfecture ?
A écouter la présentation du projet comment ne pas s'extasier : 6000 tonnes de déchets de céréales transformés en énergie propre, n'est-ce pas dans l'air du temps ? 25 000 tonnes de déchets qui au total font du compost et de l'électricité, apportant en prime un peu de chaleur à moindre frais aux serres proches comment ne pas applaudir ? C'est à partir de tels arguments que les Conseils municipaux sont invités à donner un avis qui ne peut qu'être favorable.
Les riverains ont fait entendre un autre discours qui devrait décider le commissaire enquêteur à demander un autre type d'enquête publique. A plusieurs reprises en effet, les pro Ferterris ont été amenés à dire qu'en fait une partie du document n'évoquait qu'une usine de méthanisation en général, mais pas celle de Montech. Ce qu'on appelle les tristes effets du copier coller ! Prenons un exemple : "Boues d'épuration industrielles et urbaines" a disparu du projet.
La santé
L'ARS (agence régionale de santé) a publié un texte au sujet des risques sanitaires mais ce texte n'est pas dans le dossier. Le commissaire enquêteur reconnaît alors que même si la position est globalement favorable quelques points négatifs sont notés. Lesquels ? C'est une dame de la salle qui lira le document en question qui n'est pas anodin. Autre bel exemple d'une information qui va dans un sens mais pas dans les deux.
Pour tout c'est pareil
L'épandage dans des terrains inondables ? Il y aura un arrêté préfectoral. Le contrôle des entrants, il y aura un contrat avec les fournisseurs qui c'est juré ne glisseront pas de mauvais déchets dans le lot… Et l'emploi créé ? C'est vrai, ça concerne 4 emplois fixes mais si de 300 on passait à 8000 voyait le réservoir d'emplois et puis il y a la maintenance, donc des emplois annexes… Bref rien n'est dit clairement.
Le bilan thermique
C'est la question que je pose et là encore ils reconnaissent qu'ils n'ont rien mis mais ils ont les réponses. Ils fabriquent de l'électricité mais ils en utilisent et ce bilan serait de 40 à 50%, j'ai noté mais sans tout comprendre car de toute façon ce n'est pas la réponse que je souhaitais mais pointer le principe : on a une usine qui produit mais sans consommer ! Or dans l'agro-carburant, il faut voir les deux côtés de la réalité. Mais là il s'agit de traiter des déchets.
J'en ai profité pour indiquer que pas très loin il existe une vaste zone logistique qui me paraissait destinée à accueillir une telle usine même si elle est un peu éloigné des serres d'Europlant qui doivent être chauffées. Réponse : la faible puissance oblige à rester près des serres. J'avais pris l'exemple de l'usine d'incinération de Montauban qui fait passer l'eau chaude sous le Tarn pour arriver jusqu'à l'hôpital sauf que pour chauffer des serres à 15° ce n'est pas chauffer des salles à 23° ! L'adjoint au maire de Montbartier me fera ensuite rire en tentant de démontrer que les 450 hectares commencent à être sérieusement occupées en ajoutant promesses et promesses… Allez donc sur le site et découvrez que pour le moment il y a en effet la base intermarché avec "Ce projet gargantuesque de 30 000 m² vient s'ajouter aux entrepôts, déjà réalisés, de la Phase 1 de 40 000 m²." Ce qui est gargantuesque c'est le projet de 450 hectares, mais comme a ajouté l'adjoint de Montbartier, Eurocentre (zone proche de Toulouse) a mis 25 ans avant de se remplir sauf que la conjoncture n'est plus la même et qu'en périphérie de Toulouse de telle zone pullulent !
Le montage financier
Question judicieuse en fin de réunion de la part de Valérie Rabassa : pourquoi n'y a-t-il rien sur le montage financier ? Sur ce point comme sur tous les autres, les réponses existent claires et simples et auraient donc pu figurer dans le document de l'enquête. Un tel projet peut espérer entre 10 et 25% de subventions publiques (de l'Etat et de la Région), avec un apport obligatoire de 40% des promoteurs, le reste étant emprunté aux banques. Sur 9 millions d'euros d'investissement, on peut supposer que 2 millions viendront des caisses publiques.
Puis qui décide ?
Jacques Moignard ajoutera quelques mots pour, en trois minutes, dire tout et son contraire ! L'information des habitants, c'est justement le but de l'enquête d'utilité publique donc, comme la réunion l'a montrée, chacun a pu échanger ses arguements… et quant au fait de savoir qui va payer la nécessaire reconstruction de la route communale, il va se tourner vers l'entreprise pour l'inviter à contribuer. Donc preuve est faite que le document d'enquête d'utilité publique est incomplet car ce point devrait y être inscrit pour un débat clair, entre toutes les parties, avec un phrase de ce type : "L'entreprise s'engage à verser 50 % des frais pour aménager la route d'accès". Sauf que tout le monde sait très bien que les routes sont de la compétence des collectivités territoriales qui en font la démonstration, y compris dans les zones d'aménagement artisanales. On peut discuter, quand le projet est presque bouclé, avec des informations incomplètes puis le préfet va trancher. Avant le mois de mars ? Le commissaire enquêteur indique qu'il doit remettre le rapport avant le 15 janvier et ensuite le temps sera court mais... l'entreprise annonce le début de la construction pour mi-2014.
J-P Damaggio