Lecture des législatives de 1973 à 2008

 

Afin de faire comprendre la nature des élections législatives, cette étude, surtout à partir du cas que je connais bien, le TetG, porte seulement sur un double phénomène: plus il y a de candidats et moins il y a de participation.

Le nombre de candidats

Voici l’évolution du nombre de candidats dans les deux circonscriptions du Tarn et Garonne :

Nombre Candidats	1973	1978	1988	1993	1997	2002	2007
Circonscription 1	6	9	4	11	12	15	14
Circonscription 2	8	6	4	9	13	15	13

En 1988 l’élection législative qui suit la réélection de Mitterrand est une élection rapide qui laisse peu de temps aux autres forces politiques pour se préparer. Le nombre de candidats est au plus simple (dans le tableau, il manque l’élection de 86 par listes et celle de 1981).

Mais dès 1993 l’augmentation va être phénoménale jusqu’à un petit recul en 2007. Un sursaut d’engagements militants ? Le recul du bipartisme ? L’explication est ailleurs : à partir de 1993 entre en vigueur la loi du PS de 1990, qui fait que chaque électeur offre à son candidat 1, 50 euro par an pendant cinq ans (le montant a peu changé avec le temps) ce qui semble peu mais les petits ruisseaux font les grandes rivières… Et pour réfléchir à la question rien de mieux que d’aller sur le site de la CNCCFP. (en cliquant sur le nom vous tomberez sur le rapport concernant la présidentielle). D’ailleurs si en 2007 il y a une diminution des candidatures ça correspond à une modification plus restrictive de la loi de financement des partis politiques. A présent un seuil de 2% existe sur un nombre minimum de circonscriptions (50 je crois). Le financement des partis politiques sur fonds d’Etat est, comme les primaires, une idée venue d’Italie. Jamais le moindre bilan sur la question, jamais la moindre étude. Avec des amis j’avais publié le document qui est en photo en 2002 (il reste quatre exemplaires disponibles au prix de 5 euros).

Ci-dessous l’évolution nationale du nombre de candidats et de l’abstention :

	1978	1981	1986	1988	1993	1997	2002	2007
France (candidats)	4215	2650	listes	2788	5139	6214	8444	7634
France (abstention)	16,8	29,1	21,5	34,3	30,8	32	35,6	39,6

L’évolution de l’abstention en TetG

Participation électorale	1988	1993	1997	2002	2007
Circonscription 1	16,06	25,7	27,26	27,57	33,44
Circonscription 2	16,08	25,9	27,05	30,58	35,54

L’augmentation de l’abstention est une tendance lourde, profonde, constante. Avec des ralentissements et des accélérations mais qui ne changent rien au problème.

Nous pourrions dire qu’ainsi l’Etat fait de substantielles économies en ayant globalement moins d’argent à reverser aux partis. Mais la démocratie dans tout ça ?

Tous les partis, nouveaux, anciens, du milieu, des extrêmes annoncent qu’ils sont candidats pour réduire l’abstention mais sans rien réussir ! La multiplication des candidatures a l’effet inverse de ce que la mathématique peut laisser penser : elle décourage l’électeur plus qu’elle ne l’encourage à se déplacer. Pourquoi ?

D’ailleurs au second tour, c'est-à-dire au moment décisif, il n’y a plus que deux candidats mais plus d’électrices et d’électeurs car ils savent que cette fois c’est pour décider.

En clair, mon constat n’est pas sorcier : l’augmentation du nombre de candidats manifeste un accroissement de la crise du politique ! L’électrice et l’électeur n’a plus envie d’aller se casser la tête à saisir les nuances quand il constate que de toute façon toutes les politiques se valent.

Etrangement, c’est là le serpent qui se mord la queue : l’élection favorise ceux là même qui aggrave la crise du politique ! Le mode de financement permet aux gagnants… d’être par avance des gagnants. Bien sûr qu’il y avait d’autres moyens de calculer le financement des partis, d’autant que l’aide de l’Etat ne s’arrête pas là vu la défiscalisation d’une partie du montant des adhésions.

De plus, les grands partis découragent tellement de la politique que les votants préfèrent se contenter d’aller au plus court : « le vote utile » !

Les petits partis qui souhaitent changer la donne apparaissent comme des égarés, des naïfs (quoi ! ils y croient encore à la politique !) des rois de la chicane, ou des utopistes.

Nous n’assistons pas à la montée du bipartisme comme je l’entends depuis des décennies pendant lesquelles nous avons vu arriver les Verts, les Chasseurs CPNT, le FN, l’Extrême-gauche, mais à la montée du qualunquisme qui nous vient aussi d’Italie, c’est-à-dire le je m’enfoutisme.

A l’inverse, les référendums démontrent que le citoyen n’a pas jeté par la fenêtre son envie de décider ce qu’il n’a pas l’impression de faire quand il vote pour son député !

Un constat décourageant ?

Toute l’histoire mondiale démontre que la politique a horreur du vide par conséquent d’une façon ou d’une autre cette situation subira un coup d’arrêt. L’autre règle de la dite histoire nous apprend que ce moment là ne se programme pas, ni l’heure, ni le lieu. Non que l’histoire se répète mais elle a ses constances et l’une des lames de fond s’appelle la montée des droits de personnes qui supportent de moins en moins l’esclavage, le servage, la domination, les férocités d’individus qui croient n’avoir en face que « la vile multitude ». Pour le moment cette aspiration légitime crée surtout de l’atomisation, voire de la récupération par la classe dominante (c’est cette aspiration qui a fait tomber le système soviétique) mais jusqu’à quand ?

28-06-2011 Jean-Paul Damaggio