Vendredi 13 juin 2014, visite du cimetière urbain de Montauban. Je souhaite y repérer quelques tombes. A ce jour je n’ai jamais vu la plus célèbre, celle de Manuel Azana que j’évoquerai une autre fois. Un des buts de la visite est de trouver celle de Raoul Verfeuil. On n’a pas été de trop de trois pour conduire cette recherche.
D’abord le gardien du cimetière et ses registres.
Bien sûr, rien sur Verfeuil puisqu’en fait il s’appelait Lamolinairie.
Mais plus gênant, rien non plus pour Raoul Lamonairie décédé en novembre 1927
Il y avait bien un autre Lamolinairie mais rien à voir ou presque.
J’avais récupéré le nom de la mère, Anne Lagarde décédée en septembre 1921 en pensant que le fils avait dû se retrouver dans la même tombe. Elle est sur le registre : décédée à Mazamet elle se trouve dans le trapèze M, à côté du trapèze G mais sans caveau. Seule info, elle st dans une concession.
Par la même occasion je me dis qu’il serait bien de retrouver Marcel Guerret s’il a été enterré dans ce cimetière.
Ayant la date du décès (23 janvier 1958)à pas difficile de retrouver la référence : et lui se trouve dans le caveau de la famille Busson trapèze G.
Avec le gardien, Michel Matayron qui connaît bien les lieux, est mon second guide. Nous faisons un tour pour croiser d’autres tombes puis nous arrivons dans le secteur recherché, G et M.
En fait les trapèzes ne sont pas très grands. Tout autour, donnant sur le chemin, il y a les caveaux, et au centre du trapèze les tombes toutes simples.
Nous trouvons facilement le caveau Busson (l’imprimeur) où doit se trouver Marcel Guerret mais à notre grande stupéfaction pas la moindre référence.
Autour du trapèze d’à côté, il n’y a au milieu, que quelques croix sans la moindre indication, avec un monticule de terre mais une tombe se dégage du lot car il y a une pierre tombale et une photo avec écrit en dessous : « Regrets ». Le tout devant une croix qui semble sans indication. Pour moi, je n’ai aucun doute, la photo est celle de Verfeuil. Mais on peut toujours se tromper au point de ne voir de la réalité que ce qui nous arrange.
On s’approche d’une plaque illisible devant la croix.
Le dernier nom, difficile à repérer mais évident quand on le scrute : Raoul Lamolinairie.
Contre toute attente, à trois, on a bel et bien découvert l’aiguille dans la botte de foin.
J’en suis ému car Verfeuil le pacifiste, Verfeuil le socialiste, Verfeuil l’écrivain, Verfeuil le laïque avait compris très tôt ce que l’histoire a produit comme drames. Non, il n’était pas un prophète mais un esprit libre comme la France laïque en a produit un certain nombre. Sa manie de dire ce qu’il pensait sans se soucier de la bienséance révolutionnaire, lui a sans doute coûté la vie qu’il laissa à l’âge de 40 ans pour cause de tuberculose.
Quand les communistes du Tarn et Garonne, en 1936, ont crée leur premier journal, ils l’ont intitulé La Vague et personne ne pourra jamais me dire si c’était là un hommage au titre du dernier journal dont Verfeuil fut le rédacteur en chef avec un autre esprit libre comme directeur : Henri Brisson.
J’ai faiblesse de penser que oui et j’ai même la faiblesse de penser que sans le savoir, le virus Verfeuil a traversé la guerre et a été porté en Tarn et Garonne par des continuateurs qui, sans le savoir, nous ont conduit à retrouver sa tombe simple, modeste, populaire et invisible à l’œil nu. Nous rendrons justice à ce militant qui osa vivre debout face à tous les géants. Jean-Paul Damaggio