Débat à la Librairie Deloche
Ils sont quatre à la tribune dont trois liés par une présence pendant trois ans à l’école normale de Montauban. L’un a publié un journal d’instit, l’autre en tient un entre ses mains et le troisième annonce qu’il a le titre d’un livre dans la tête : Grand-père ils vont tuer l’école. Le quatrième a un parcours totalement différent apportant un regard extérieur en tant que prof en lycée.
Dans la salle, elle reconnaît qu’elle était une mauvaise élève qu’à partir de la classe de Cinquième un déclic s’est fait qu’elle a eu ensuite une formation en apprentissage mais elle a pu faire des progrès grâce à la lecture. Moment émouvant car il renvoie les enseignants vers des tonnes d’interrogations et j’en prends une, chère à un des intervenants : qu’est ce que savoir lire ?
Il est entendu qu’au CP on apprend à lire et à la fin du CE1 la « compétence » doit être acquise. En fait, finit-on un jour d’apprendre à lire ? L’intervenant a témoigné du fait que dans l’apprentissage rien n’est linéaire si ce n’est la passion d’apprendre. Pour une langue il faut la comprendre, la parler, la lire puis l’écrire. On peut savoir la lire sans pouvoir la parler, on peut la comprendre sans savoir la lire etc…
L’école d’hier avait ce défaut majeur de se présenter comme un tout : à l’école on apprend puis ensuite on travaille. La notion « d’apprentissage tout au long de la vie » est arrivée mais pour fausser la réalité : c’est pour relativiser la fonction de l’école.
Hier l’école était un ascenseur social car la société était en ascension ! L’usine jouait aussi ce rôle et combien sont-ils ceux qui, grandissant avec leur usine, ont pu gravir les échelons jusqu’à celui d’ingénieur ?
Pour résoudre le problème actuel de l’école la solution mise en œuvre par la hiérarchie c’est de changer l’instit en technicien. Un des présents témoigne de son expérience en science avec la main à la pâte. Il affirme que les autorités ont retenu la technique en perdant les valeurs liées à cette technique. Puisque nous étions dans une librairie à l’invitation des éditions La Brochure je fais référence à un livre que nous avons publié et qui relate la même chose. Il s’agit d’enseignants qui à Castres inventèrent un prix littéraire de lycéens à l’adresse d’un premier roman. Les autorités ont tout fait pour tenter de retenir la technique en en perdant l’esprit. Il y a eu une lutte mémorable. Aujourd’hui il existe un prix des lycéens mais sans aucun rapport avec le travail de fond réalisé à Castres et qui a marqué les esprits comme nous avons pu le vérifier à la vente du livre.
Il est évident que le prof enseignant une matière met en œuvre une pédagogie beaucoup plus technicienne que celle de l’instit.
Si l’instit entraîneur de l’équipe de foot, animateur de l’amicale laïque, secrétaire de mairie n’est plus de saison c’est pourtant par cette fonction globale que l’école se fabrique. L’amour du métier, c’est pour les uns l’amour des mots, l’amour des gestes, l’amour des enfants, l’amour de l’art, l’amour du rire et rien ni personne ne peut demander à effacer cet amour pour se changer en pur technicien ! Sans la passion, adieu l’éducation et cette passion ne se mesure pas, ne se quantifie pas ni en heures de travail, ni en taux d’enfants réussissant au bac.
Un constat classique a été rappelé : pour trouver du travail il vaut mieux avoir le bac, il vaut mieux avoir des diplômes d’où le besoin d’écoles. Mais il ne faut pas en retour considérer que les sans diplômes sont sans qualités d’autant qu’il n’est jamais trop tard pour reprendre des études.. y compris pour un diplômé ! Une amie à la retraite passe une thèse, un docteur à la retraite se lance des études d’histoire etc. JPD