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14 avril 2009 2 14 /04 /avril /2009 13:50

Pour clore ma vie d’instit en 2006, il m’arriva d’écrire un livre où chaque année était consacrée à la présentation par un dialogue entre Luis l’actuel et Louis l’ancien, d’un enseignant qui marqua agréablement ma vie. A chaque fois je les ai fait précéder de mots d’enfants. Je vais en donner quelques-unes puisque la vie vient de m’inciter à revenir sur le sujet. Celle-ci mêle à la fois l’année 1968 et l’année 2005. J-P D.

 

 Le remplaçant entre en classe et demande :

— Comment fait-on pour les tickets de cantine ?

— Maintenant, c’est le maître qui nous demande ce qu’il doit faire ! s’exclame une petite fille.

— C’est normal, il est en classe en classe, répond son voisin. (comprenne qui pourra).

(enfant de 7 ans, Monbéqui)

 

1968

 

« A la rentrée de 1968, par hasard, Louis se retrouve à l’Ecole Normale. Par hasard car, quand son prof de français de Seconde lui apprit qu’il l’avait vu sur la liste des reçus à l’écrit, il lui déclara : « Ne me dites pas que c’est vous qui avez tenté le concours de l’E.N. et qui êtes sur la liste des reçus ? ». C’était lui et, ayant passé avec succès l’oral, il fut sur la liste des futurs instits. »

 

Comme en classe de Quatrième, quand on lui demanda de choisir son orientation, Louis préféra l’hypothèse basse. Il peut, soit passer en Première (ses résultats le lui permettaient), soit redoubler la Seconde. Il opte pour une nouvelle Seconde. Voilà comment, à refaire le même programme de maths, avec un autre professeur plus brouillon que le précédent, car trop emporté par l’enthousiasme, il mesure mieux la rigueur pédagogique de Monsieur Lachaud. Mais laissons les maths pour le prof d’histoire.

 

Comme pour le CEG se transformant en CES, ou le lycée se transformant en collège, l’Ecole normale vivait alors un carrefour de son histoire. Avec l’arrivée de la mixité. Avec le départ à la retraite de toute une série de profs historiques dans la maison, avec ensuite la création de la deuxième année de formation professionnelle.

Le prof d’histoire était un des historiques marquant de Montauban qui avait comme surnom affectueux « Le Toine » (à l’Ecole Normale tous les profs avaient un surnom). Il transforme, chez Louis, sa passion pour l’histoire, en passion pour l’écriture de l’histoire. Ce prof, assis tranquillement à sa place, met les élèves devant des DOCUMENTS (reproduits ou réels). Ainsi, le savoir historique cesse d’être un discours pour devenir une recherche vivante. Comme Monsieur Lachaud, Monsieur Ombret a non seulement la passion de sa discipline mais aussi celle de la faire vivre à l’école primaire. Avec les Archives départementales, il lance (une fois à la retraite) une série de reproduction de documents d’histoire locale publiée modestement avec une ronéo. L’approche locale peut conduire au localisme ou à l’émiettement mais pas avec le Toine qui construit sa toile globale comme un monde généreux. C’est vrai, ce monde s’arrête aux limites de la France puisque tel est le programme. Monsieur Ombret fort d’une vision politique et humaine de l’histoire cherche le nom des gloires locales pour donner de la chair à l’histoire nationale. Son équilibre entre toutes les données des problèmes était parfait, une perfection qui s’explique, à la fois par sa grande connaissance de sa discipline, et par le souci pédagogique qui l’animait en permanence y compris devant les enfants.

 

« L’envoi des recueils de documents d’histoire locale dans les écoles a cessé depuis longtemps. Or avec les moyens modernes de production d’écrits, ils pourraient devenir plus agréables à la lecture. Pourquoi cette lecture fondamentale a disparu malgré le maintien du service éducatif ? L’histoire a besoin de documents pour exister et nous les croiserons autrement.»

 

De cette année d’E.N., Louis garde donc un vague souvenir de cet événement important : sa première entrée aux Archives départementales de Montauban. Il a la vision de la salle dans la tête mais impossible de retrouver un seul élément de l’activité. S’agissait-il de documents sur la Révolution française ? Pourquoi faire de ce jour-là un jour marquant ? On ne sait pas exactement comment on apprend et ce qu’on retient. Par quels chemins passent nos pensées ? Simplement, à un moment, un élément de l’apprentissage concentre tant de phénomènes qu’il devient inoubliable.

 

« Louis ne reviendra dans les Archives que dix ans après, avec, entre les mains, le travail de Monsieur Ombret présentant des documents sur le coup d’Etat de 1851, un travail qui ne l’a jamais quitté. De fil en aiguille, il a travaillé à l’histoire locale et moins locale. Pour le service éducatif qui existe toujours il a eu l’occasion de le fréquenter avec des élèves en 2005. Ce qui lui donne l’occasion d’un portrait d’enfant, un petit garçon noir avait quelques compétences en matière d’humour. En partant, il ne cacha pas sa mauvaise humeur : « aller voir des papiers de vieux, beurk, c’est nul ». « Reste à l’école dans une autre classe » lui dit Louis ; mais, à tout prendre, il y avait au moins la promenade à pied. Puis, au cours de la visite, dans une allée de livres, il avoua à un copain : « t’as vu, c’est incroyable, moi si je pouvais rester là, je passerais la journée à lire ». En repartant, de tous, il était le plus heureux de cette visite racontée dans le numéro 4 du journal de classe, Le Buissonnier. Voici ce texte tout comme celui qu’il rédigea dans le numéro 1 pour raconter le voyage qu’il venait de faire en Afrique. Son père l’avait enlevé à sa mère pour l’amener en France sans pouvoir ensuite en assurer l’éducation. Placé dans une famille d’accueil, et très fort en matière de rugby, il arrivait de ce premier retour dans sa famille maternelle, au moment où Louis entrait dans sa vie.

 

Visite aux archives départementales du Tarn-et-Garonne

Pour aller aux Archives situées au Cours Foucault à Montauban, on a marché. On a traversé le Pont vieux, le pont le plus ancien de Montauban. Ça fait trop haut ! Puis on a été accueilli par une dame. De la cassette vidéo visionnée au sujet du travail aux Archives, il fallait retenir quatre verbes importants : collecter, classer, restaurer, communiquer. Vingt-cinq personnes font fonctionner les archives. On a vu le document le plus ancien qui remonte à 9 siècles, un original écrit en latin. Il est fait en parchemin c’est-à-dire avec de la peau d’animaux : chèvres ou moutons.

 

On a visité toutes les pièces et même où c’est interdit au public. Le premier groupe est parti, ensuite nous, on est rentré dans la salle interdite, mais bon, c’était exceptionnel, et le monsieur nous a dit que les rangées des livres mises bout à bout, ça faisait 12 kilomètres, peu par rapport à celles des Archives nationales à Paris qui font 200 kilomètres.

Ensuite on a fait deux choses différentes : voir l’atelier de photographie, la dame nous a expliqué comment la machine marche avec une bobine pour faire des micro-films.

Puis, au deuxième étage, une autre dame nous a expliqué comment elle restaurait des livres. Ils ont dit qu’il ne faut pas scootcher alors j’ai demandé pourquoi. Le monsieur a répondu : « Parce que ça abîme le livre pour toujours ».

Avec la dame, un monsieur travaillait à la numérisation avec un ordinateur et un scanner : des photographies mises sur un CD-Rom pour ceux qui veulent les photocopier ou consulter sur Internet. Dans les allées, le monsieur nous a montré plein de cartes, au moins 200 à 300 cartes, dans un seul livre. Ça m’a vraiment étonné ce grand livre de cartes. C’était un peu comme un atlas. La dame a montré une ancienne collection de La Dépêche.

 

On est redescendu et nous avons consulté des livres très vieux avec un questionnaire au sujet du livre : nom de l’auteur, la date, et autres renseignements le concernant (sa côte écrite sur le côté pour le classer). L’exercice c’était de dire ce que les livres donnent comme renseignements. Il y avait surtout des registres de l’Etat civil qui donnent les actes de naissance. Parmi les vieilles écritures il y en avait de belles. Beaucoup de gens utilisent ces registres pour la généalogie.

Les Archives départementales, j’ai trouvé que c’était super. C’était trop bien. Moi, je me suis vraiment ennuyé mais sinon j’ai appris beaucoup de choses. Tandis que moi, je trouve que c’était très intéressant, en plus c’était super bien organisé. La visite guidée était utile car on a vu plusieurs ateliers et beaucoup de livres : en tout 12 kilomètres. Pour moi, j’ai adoré cette journée, c’était trop cool. On a appris beaucoup de choses.

Nous ne sommes pas repartis sans rien. A la fin, on a nous a donné des marque - pages, une feuille d’explication pour relier des livres avec des échantillons de pages et le sceau en plâtre de la République. On a appris qu’on pouvait venir faire des recherches dans une salle de lecture.  Extraits des textes des enfants de la classe.

 

Mon histoire en Afrique.

 

J’ai pris l’avion à Toulouse-Blagnac pour aller à Paris. De là, je suis parti jusqu’à Djamena et à Djamena, direction Bangui parce que j’étais parti pour voir ma maman à Bangui. Dans le quartier de Bangui, j’habite à Fatima. La première fois que je suis descendu de l’avion, à Bangui, j’ai commencé à transpirer parce que, comme à Toulouse il faisait froid, et comme j’avais porté des habits exprès pour l’hiver, j’étais trop couvert. En plus, mon père m’avait mis des choses dans mes poches, alors à chaque fois, mon pantalon me lâchait, tout le temps je devais le remonter.

 

C’est beau la vue d’avion : quand tu vois la ville de Paris avec la Tour Eiffel, c’est beau, et après, quand tu vois Bangui, ça change beaucoup parce qu’à Paris, il y a plein de lumières. A Bangui, il n’y a que des champs et tout plein de choses. Quand je suis descendu, deux militaires m’accompagnèrent jusqu’au hall de l’aéroport. Mon grand-père, qui m’attendait, me dit de me retourner. Il m’a dit de me retourner et là je n’ai pas reconnu ma maman car elle a beaucoup changé. Quand mon grand-père m’a dit que c’était ma maman, je suis allé la serrer dans mes bras. Après, j’ai dû aller reconnaître mes bagages. Quand je les ai récupérés, nous sommes sortis avec ma mère, mon grand-père et ma tante. Dehors j’ai vu mon tonton qui avait beaucoup changé.

 

On a attendu 5 minutes la voiture de mon grand-père. Ensuite, on est parti dans une maison où on a remis des chaussures à un ami de mon père. On est parti chez ma mère. En chemin, j’ai vu le marché, les ordures sur la route, et tout plein de choses. On est arrivé à la maison que je ne connaissais pas. Quand j’avais cinq ans, elle était plus grande, mais la guerre a tout changé. Tout le monde était fier de me voir. Ma mère avait un bébé de trois mois qui s’appelle Rubeine, il était trop beau et trop mignon. Je l’ai pris dans mes bras, et aussi, il y avait ma sœur que je connaissais déjà et qui avait changé.

                                 Un enfant de la classe

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